Les petites cases

Victoria, le Canada et la TEI, suite et fin

Comme toutes les bonnes choses ont une fin, je m'apprête dans quelques heures à quitter Victoria et à reprendre l'avion pour rentrer à Paris, des souvenirs, des idées, des pensées pleins la tête, comme à chaque fois que je repars d'un colloque.

Comme certains d'entre vous ont eu l'air d'apprécier mon précédent billet (Merci encore Jean-Paul), je m'en vais vous conter la fin de ces journées. En fait, cela va aller assez vite (j'en vois certains qui sont rassurés dans la salle). Je n'ai pas vraiment assisté à un SIG, pris par l'écriture de mon précédent billet et la perspective de la poster session. D'ailleurs, cette dernière s'est bien déroulée, le poster que j'avais fait a été apprécié (encore merci à Nico et Manue pour leur coup de main). Notre projet de numérisation des cartulaires numérisés a fait l'admiration des différents bibliothécaires présents qui se sont succédés pour savoir comment nous utilisions METS. Quant aux geeks de la TEI et aux chercheurs, c'est surtout theleme, notre manuel en ligne de sciences auxiliaires qui a retenu leur attention. Quant aux autres posters, je n'ai pas vraiment eu le temps de les voir et pour la plupart ils correspondent aux interventions dont je vous ai parlé.

Je vous fais grâce des interventions de rigueur dans la vie d'une association, pour arriver à la keynote de clôture. Greg Crane, responsable de la bibliothèque numérique Perseus, nous a présenté sa vision de la « vie intellectuelle à l'âge de Google ». Après avoir analysé notre monde actuel et les problèmes des sciences humaines aujourd'hui par rapport à celui-ci, analyses que je partage avec lui, il a présenté ce qui représente sa solution, c'est à dire son projet. Son idée est simple, nous devons absolument faire de la masse, pour être présent, marquer notre territoire et montrer aux tutelles que l'investissement en sciences humaines est rentable. Pour cela, il faut aller discuter avec Google, Microsoft ou Yahoo pour récupérer l'OCR et y appliquer un balisage structuré en TEI, mais très lâche.

Soyons honnêtes, c'est très impressionnant, son sytème a l'air de bien fonctionner. Mais, j'avoue que son discours m'a gêné. Est-ce que notre métier doit être le même que celui de Google ou Yahoo ? Est-ce-qu'il faudrait que nous allions jouer sur leurs terrains ? Ou est-ce-que nous pouvons mettre en avant une véritable différence et la cultiver ? J'avoue que je n'ai pas les réponses à ces questions. Pour autant, j'ai vu dans cette keynote la différence culturelle qui peut exister entre les chercheurs nords-américains et nous autres Européens (je partageais cette analyse avec ma collègue et amie du King's college Elena Pierrazo). Au final, je ne crois pas qu'il faille blâmer ou regretter cette position, après tout, c'est certainement cette vision qui sera celle de demain, mais, au bout du compte, je suis persuadé qu'il faut que toutes les positions coexistent : les googles qui font les grandes masses, les bibliothèques qui en font moins, mais avec des qualités de numérisation et de métadonnées plus importantes, les chercheurs qui font de la transformation de masse de l'OCR en XML structuré ou encore les chercheurs qui encodent très finement leurs corpus en TEI. Oui, il y a de la place pour tout le monde et aucune des différentes visions n'est meilleure que l'autre, elles se complètent tout simplement.

Cette keynote a marqué la fin de l'assemblée générale, mais je n'en avais pas fini pour autant, puisque j'ai eu la chance d'assister le lendemain (cad hier) au TEI board, le conseil d'administration restreint de la TEI. On n'imagine pas, lorsqu'on utilise la TEI, l'énergie, l'argent, les discussions et les débats qu'il faut pour faire vivre un standard comme celui-ci. J'avais parfois l'impression que dans cette chambre d'hôtel transformée en salle de réunion se jouait l'avenir d'un des standards les plus importants de notre discipline. Heureusement, les gens qui sont à la tête de la TEI ont conscience des enjeux. Pour autant, il faut quand même avoir conscience de l'extrême fragilité du modèle, le TEI consortium, indispensable pour maintenir les guidelines, en faire la promotion... vit en très grande partie aux adhésions des institutions. Alors, si, dans votre institution ou au cours d'un projet, vous utilisez la TEI, pensez que votre projet vit grâce au consortium et à toutes ces personnes et adhérez au consortium. C'est, me semble-t-il un échange de bon procédé et qui, en plus, vous permettra d'assister à l'assemblée générale annuelle et de rencontrer cette formidable et très sympathique communauté.

MAJ (05/11/2006) : Vous pouvez aussi consulter les notes de Sharon Goetz beaucoup plus précises que les miennes. Merci Sharon !

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